L'accord modifie en profondeur des pans entiers du code du travail. Certaines mesures donnent une plus grande liberté d'action aux entreprises qui veulent se restructurer. D'autres renforcent la protection des salariés.
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■Licenciements
Les règles de contestation des licenciements économiques collectifs sont bouleversées. Le but est de limiter le contrôle des tribunaux, qui débouche parfois sur l'annulation du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE, plan social) ou sur le versement de dommages et intérêts aux salariés. Désormais, la procédure et le contenu du PSE feront l'objet soit d'un accord majoritaire, soit d'une procédure d'homologation par l'administration. Des recours devant le juge sont possibles, contre la procédure elle-même ou contre la teneur du PSE. Le salarié peut également saisir la justice si le motif du plan social ne lui paraît pas valable – mais dans des délais plus courts qu'avant. Pour fixer l'ordre dans lequel les salariés sont licenciés, le chef d'entreprise aura la possibilité de "privilégier la compétence professionnelle".
■Conciliation
L'objectif est d'accélérer la résolution des litiges liés à un licenciement. Lors de l'audience de conciliation, qui se tient au début de la procédure devant les prud'hommes, le patron et son salarié peuvent mettre fin à leur différend, moyennant le versement à ce dernier d'une indemnité forfaitaire, qui varie en fonction de son ancienneté.
■Accords de maintien dans l'emploi
Ils consistent à permettre aux entreprises confrontées "à de graves difficultés conjoncturelles" de baisser les rémunérations et/ou le temps de travail ; en contrepartie, elles s'engagent à ne pas licencier. L'accord, qui nécessite le feu vert du ou des syndicat(s) représentant au moins 50 % du personnel, est conclu pour une durée maximale de deux ans. Les salariés qui refusent de se plier à ces nouvelles conditions de travail sont licenciés. L'employeur doit leur proposer "des mesures d'accompagnement" mais il n'est pas soumis aux obligations liées à un licenciement économique collectif (offre de reclassement, etc.).
■Mobilité interne
Les entreprises peuvent mettre en place une organisation qui contraigne, en cas de besoin, les salariés à changer de poste ou de lieu de travail. Celui qui refuse cette nouvelle affectation est licencié "pour motif personnel" ; il a droit à des "mesures de reclassement" mais les obligations pesant sur l'employeur sont moins fortes que celles liées à un licenciement économique.
■Droits rechargeables
Cette mesure cherche à encourager le retour sur le marché du travail des chômeurs. Elle leur permet, quand ils reprennent une activité, de garder les droits à l'assurance-chômage non utilisés. Toutefois, ce dispositif ne doit pas "aggraver le déséquilibre financier" de l'Unedic. A cet effet, des études d'impact seront conduites et suivies de mesures correctrices en cas de dérapage. La construction du dispositif sera aussi tributaire de négociations sur la convention d'assurance-chômage, qui doivent s'ouvrir cette année.
■Généralisation de la complémentaire santé
Les entreprises devront souscrire un contrat auprès d'un organisme (mutuelle, assurance, institution paritaire...) pour proposer à leur personnel une couverture collective complémentaire des frais de santé. Le financement de ce mécanisme sera partagé par moitié entre les salariés et les employeurs. Les salariés qui perdent leur emploi bénéficieront de la couverture santé et prévoyance pour une durée portée à un an (contre neuf mois jusqu'à maintenant).
■Temps partiel
Pour mieux encadrer l'exercice du temps partiel, des négociations s'ouvriront, notamment dans les branches très concernées par le phénomène (au moins un tiers des effectifs). Les salariés ne pourront pas travailler moins de vingt-quatre heures par semaine (excepté ceux qui sont employés par des particuliers et les étudiants de moins de 26 ans). Toutefois, une durée d'activité inférieure est possible si le salarié le demande pour être au service de plusieurs employeurs.
■Compte personnel de formation
Dès son entrée sur le marché du travail et jusqu'à son départ à la retraite, toute personne aura un compte individuel de formation, quel que soit son parcours professionnel.
■Information et représentation des salariés
L'accord instaure une "base de données unique" sur l'entreprise, consultable par les représentants du personnel et par les délégués syndicaux. Ces informations visent à donner "une présentation pédagogique (...) des options stratégiques" de la société. Dans les entreprises employant au moins 10 000 personnes dans le monde ou au moins 5 000 en France, il est prévu d'accorder un ou deux postes d'administrateur aux salariés (avec voix délibérative).
Bertrand Bissuel
journal du Monde Politique